Drôle de manège (Conte pour enfants)

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    Ceci n'est pas la suite du "procès du loup"...
    ...mais c'est le début d'un conte, qui trouvera son titre chemin faisant . Et, peut-être, à un moment de l'histoire, le loup apparaîtra... cela dépendra de mon inspiration et de la vôtre, si vous voulez bien écrire ce conte avec moi....

    Misslou


    Il était une fois,
    quelque part dans le Nord de la France,
    une petite ville au milieu des champs, avec une jolie place pavée comme on en voit dans les albums illustrés : deux tilleuls, trois platanes, une fontaine au milieu, la boulangerie, la mercerie et le marchand de couleurs. Quelques passants affairés la traversent, si peu de promeneurs et juste quelques chiens en maraude qui traînent autour du vieux manège .

    Un manège ?

    Oui, un manège. Mais n'imaginez pas des voitures en plastique rouge, des avions et des autobus jaunes et verts, une musique criarde et des klaxons tapageurs. Non, non. C'est un manège de bois, aux couleurs un peu passées, vieux rose et vert véronèse, orné de miroirs et de petits paysages désuets représentant des voiliers sur la mer, des bergères dans les prés, de joyeux ramoneurs. Il est éclairé de petites ampoules qui lui donnent un air de fête discrète.

    Mais, le manège est cassé et depuis plusieurs jours, il ne tourne plus et ses mélodies d'orgue de barbarie n 'égayent plus la place.

    Les quatre chevaux de bois, blancs harnachés de gris ne galopent plus, la calèche attelée aux deux poneys noirs et blancs est immobile, le dromadaire au pelage délavé s'endort et les deux cygnes blancs ne bougent pas.

    Le propriétaire du manège est parti chercher rouages et engrenages à Arras, la grande ville du canton, pour réparer la mécanique, mais les chevaux s'impatientent et l'un d'eux propose à ses compagnons :
    - "Partons, mes amis ! Je n'en peux plus de rester figé sur cette place triste et déserte. Nous n'avons même plus la visite et les rires des enfants. Quelle vie de misère ! Songez aux belles balades qui s'offrent à nous, aux chemins de campagne fleurant bon l'herbe tendre, au coucher de soleil sur les champs de blé, aux belles prairies..."

    Alors, les animaux discutent, se concertent et tous, ils décident de partir et de quitter le manège, dès que la nuit sera venue...

    Quelques averses ponctuèrent la fin d'après-midi.
    - " C'est qu'ici nous sommes quand même bien à l'abri", fit remarquer le dromadaire maintenant bien réveillé.
    Les autres argumentèrent et finir par le convaincre que rien ne devait les faire revenir sur leur décision et surtout pas leur petit confort. Bientôt les réverbères de la place s'allumèrent d'une douce lumière mais qui empêchait de compter les étoiles dans le ciel de plus en plus noir. Malgré le petit vent de Septembre, la soirée restait douce et arriva le moment tant attendu de se faire la belle .
    Ce furent d'abord les cygnes qui battirent vigoureusement des ailes et bientôt s'élevèrent dans le ciel en s'arrachant de leur socle de métal. Ils lancèrent des cris de joie en tournant autour de la place. Les quatre chevaux encouragés par cet élan commencèrent à remuer, à souffler et à décoller, un par un, leurs sabots, faisant valser vis et boulons. Et heureux de se dégourdir les jambes, les quatre amis dansèrent un quadrille sur la place pavée au risque de réveiller tout le quartier !
    Les deux poneys, enthousiastes, ne mirent pas longtemps à se mettre en mouvement et le dromadaire poussa la calèche tout en se dégageant, lui aussi, du plateau du manège. Les roues de la calèche grincèrent un peu mais finalement, Tri-Tra-trot ti galop ! tout le petit groupe des évadés put se mettre en route, guidé par les deux cygnes qui traçaient des allées et venues dans le ciel, au-dessus de ce drôle de cortège.

    Deux chiens errants attirés par les cris joyeux des cygnes suivirent ce curieux défilé et tous remontèrent la rue principale en direction d'Ostreville....

    Ils marchèrent jusqu'au matin, écoutant les bruits de la nuit, le chant du hibou et celui des grenouilles. Ils passèrent dans les petits chemins de campagne où la calèche cahotait de-ci delà et ils firent halte, près d'une vieille ferme abandonnée, pour admirer le lever du soleil.

    Le coq d'une girouette toute rouillée, perché sur le toit délabré, les écoutait discuter :

    - " Je voudrais tant marcher dans le sable, dit le dromadaire et retrouver cette impression d'un sol si doux sous les pieds.
    - Moi, je voudrais bien me débarrasser de cette calèche, dit l'un des poneys shetland et pouvoir galoper librement.
    - Une belle prairie au soleil, c'est tout ce que je demande, dit l'un des chevaux blancs."

    Alors le coq prit la parole :
    - "Pour une prairie, ce n'est pas bien difficile, il suffit de choisir dans le paysage tout autour. Pour marcher dans le sable, il faut aller vers l'ouest, au bord de la mer, ce n'est pas très loin. Enfin, je connais au village voisin un maréchal ferrant qui saurait sûrement dételer cette calèche. Mais je suis cloué ici depuis des années, j'aimerais tellement moi aussi retrouver ma liberté."

    Alors les cygnes volèrent autour de lui et l'encouragèrent à battre des ailes. Et après beaucoup d'efforts, le coq arriva à dégager ses pattes de son ancienne girouette et laissant là les quatre points cardinaux, il voleta comme il put et soutenu par les cygnes se posa sans souci sur la terre ferme. Ils le virent gratter le sol, s'ébattre et picorer. Puis il se se percha sur la calèche pour guider l'attelage vers le village voisin.

    C'est ainsi que chacun suivit son chemin, pour aller vers son rêve. Le soleil était plus haut dans le ciel et les cygnes prirent le large traçant un grand cercle dans le ciel et promettant de survoler toute la contrée pour garder le contact avec chacun des anciens compagnons de manège. Et tri-tra-trot ti galop ! les poneys se mirent en route, guidés par le coq perché sur le siège du cocher...

    Ils arrivèrent bientôt dans le petit village Hernicourt, devant l'échoppe du maréchal-ferrant qui commençait à ranger ses outils pour la pause de midi. Toutes ces pinces, ses marteaux, ses clous et ses pointes faisaient un peu peur aux deux poneys, mais ils se mirent à hennir très fort et le brave homme sortit pour voir ce qui se passait. Il ne mit pas longtemps à comprendre que ces deux-là en avaient assez de traîner cette calèche d'opérette, décorée de rubans verts et roses et en examinant les fixations des deux timons, il constata qu'il ne lui faudrait que quelques instants pour libérer les poneys.

    En deux, trois tours de tournevis et quelques coups de marteau, la besogne était faite et il eut plaisir à voir gambader les shetlands, trop heureux d'être détachés. Le coq préféra rester au village mais les poneys repartirent, décidés à faire route ensemble, même s'ils n'étaient plus attachés !

    Pendant ce temps le dromadaire voyageait en solitaire. Les anciens oiseaux du manège lui faisaient signe... dès que l'itinéraire le nécessitait, mais grosso-modo notre ami marchait plein ouest, impatient de voir la mer et surtout le sable de la plage. Il suscitait bien de temps à autre la curiosité des passants. Mais dans ce monde d'indifférence, il pouvait continuer son chemin sans que personne n'y prête plus attention que cela.

    Le dromadaire avait passé la nuit dans un square, couché dans le petit carré de sable ! Il n'y avait pas beaucoup de place, mais cet endroit lui rappelait les enfants du manège et puis, ce petit échantillon de sable lui donnait un avant-goût de plage et du courage pour continuer son chemin.
    Dans le square, perché sur le toboggan, un chat l'observait ;

    - " D'où viens-tu, chameau ? Je ne t'ai jamais vu par ici....

    - Je suis un dromadaire, chat ! Les chameaux ont deux bosses, comme le nombre de syllabes dans le mot : cha-meau. Moi, je n'ai qu'une bosse. Je viens d'un manège et je vais vers la mer.

    - Tu n'es guère aimable dromadaire ! et c'est pour cela que je continuerai à t'appeler "vieux chameau". Bien le bonjour ! "
    et le chat s'en alla lui tournant le dos, une bosse ou deux bosses la belle affaire, il avait mieux à faire....

    Notre ami déplia d'abord ses pattes de derrière comme font tous les dromadaires, puis déplia ses pattes de devant pour , péniblement, se remettre debout, avec ce curieux balancement...de quoi vous donner le mal de mer !
    Cette journée ne commençait pas très joyeusement, ce chat l'avait agacé, la musique d'un limonaire qui accompagnait autrefois tous ses mouvements lui manquait et c'est silencieux et amer, qu'il reprit son long itinéraire...
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  • misslou
    • misslou
    Pendant ce temps, les poneys avaient bien trottiné. Ils avaient passé le petit pont qui enjambe la Ternoise, une petite rivière bien agréable pour se rafraîchir, ils avaient brouté une herbe de première qualité et mangé quelques pommes laissées là par la générosité d'un grand pommier.
    C'est peu après, qu'ils étaient entrés dans la forêt d'Hesdin juste au moment où une file de jeunes cavaliers à poneys s'éloignait sur la belle allée forestière. Un regard de connivence leur suffit et pressant le pas, ils s'ajoutèrent, l'un derrière l'autre, ni vu ni connu, en bout de file et suivirent le groupe jusqu'à un petit Centre équestre en lisière du bois. Avec aplomb, ils passèrent devant les box des grands chevaux et se rangèrent, comme les autres, devant les barrières.
    Des parents accueillaient leurs bambins, des moniteurs commençaient à ôter filets, rènes et selles et dans cette agitation, personne ne remarqua que ce soir-là, il y avait douze poneys au lieu de dix !
    Brossés, dépoussiérés, les sabots curés, on les emmena dans la douce litière de l'abri des poneys où ils reçurent leur ration, comme les autres.
    La nuit, les deux amis se félicitèrent d'avoir trouvé ici, le paradis : nourris, logés et des promenades en forêt avec les enfants, un enchantement !
    Mais le lendemain, le programme fut tout autre : cours de 10 à 11 heures sur le manège.

    Un manège ?

    Oui, un manège ! Mais quelle déception... en effet, là aussi , il fallait tourner en rond et il n'y avait même pas de musique. En plus, les tours de manège duraient des heures sans pause. Encore un travail bien morose, une vie pas bien rose.
    Dès midi, Tri Tra tro ti galop ! Ils étaient repartis !
    Après s'être cachés dans le box d'un grand alezan fort arrangeant, ils avaient filé à l'anglaise, pour gambader à leur aise dans les sous-bois, pour savourer ici, la luzerne parfumée et là, le goût de la liberté retrouvée .
    misslou

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