Challenge d'écriture "Loup" - Mai 2017

Nous avons nos gagnants :

  1. Blanche MtCl (Histoire n°2) (Voir notre article sur blanche). Cet essais a été repris sur notre forum afin de débuter une nouvelle histoire : Loup-Garou . Histoire à lire, à suivre et à écrire !
  2. Misslou  (Histoire n°1), Le procès du Loup. Cet essais a également été repris sur notre forum afin de commencer, cette fois,un conte pour enfants "le procès du loup"
  3. Neph (Histoire n°3), également repris sur le forum dans "Loup-Garou"

Nous vous avions présenté Misslou et Neph lors du précédent concours.

Nous remercions ces talentueux auteurs pour leur participation.

Challenge d'écriture

Histoire n°1 (Auteur : misslou)

Le procès du loup


" Accusé, levez-vous !

Le loup penaud pointa son museau de derrière ses avocats, pingouins et pandas en robes noires et blanches.

- ...et le Petit Chaperon Rouge, vous ne pouvez nier les faits, tout de même !

L'accusateur parlait fort et la salle s'indignait. Lapins, souriceaux et blaireaux eux-aussi accusaient le loup.

-  Il faut dire pour notre défense, reprit le Panda, que le Petit Chaperon Rouge sort, en fin de conte, sans préjudice du ventre du loup dans bien des versions de l'histoire.

-  Et l'agneau se désaltérant dans l'onde pure " n'est-il pas la pauvre victime de ce loup sanguinaire ? reprit le Procureur.

Le loup sortit alors de son silence et lança à l'assistance :

- Ce La Fontaine me donne les mauvais rôles
Et même en alexandrins, mon sort n'est point drôle !

- Et ma pauvre Blanchette, chevrota le vieux Monsieur Seguin ! 

- Et mes trois cousins, s'écria un petit cochon !

- Moi, je l'ai attrapé le méchant loup, s'enorgueillit Petit Pierre...

- Oui, mais il a tout de même mangé le canard, répliquèrent les autres personnages du conte musical !

Chacun trépignait de colère, demandant réparation, criant vengeance, tant et si bien que le juge de ce procès, le Lion, rugit à en faire trembler les murs :

- Silence, ou je fais évacuer la salle ! Loup, allons, peux-tu nous citer un exemple où tu n'es point le bourreau mais la victime ?

- Est-ce ma faute à moi, si les auteurs m'ont pris en grippe et m'ont toujours décrit comme un démon assoiffé de sang ! Néanmoins, mon aïeul Isengrin n'a été qu'une pauvre victime dans le Roman de Renard et c'est toujours le rusé Goupil qui tirait son épingle du jeu et ridiculisait le pauvre leu.

- Et qui est l'auteur de ce Roman de Renard ? demanda le juge léonin.

- Justement Votre Excellence. Encore un coup du sort, les écrits sont restés, mais personne n'a noté le nom de l'auteur et les historiens cherchent encore...

- Loup. Tu seras condamné. Trop de sang et trop de méfaits te sont reprochés. Toi et toute ta lignée, resterez maudits à jamais !
La séance est levée."

Et le loup fut condamné à pleurer éternellement sur son sort. N'entendez-vous pas, le
soir, cette longue plainte qui monte vers le ciel ? C'est le loup qui gémit et pleure encore, il hurle toute sa peine et son remords.

Histoire n°2 (Auteur : BlancheMtCl)

« Où est-ce que tu te caches, sale clébard ? m’écriai-je dans la pénombre. Montre-toi ! »

Nous étions vendredi soir, j’avais bu quelques bières de trop, comme souvent depuis quelques temps. Depuis que j’avais vu le vrai visage de ce salaud. J’avais pris l’habitude de m’installer dans les fourrés la nuit, en fonction du cycle de la lune, avec une bouteille de vodka ou un pack de six. Et tapis dans l’ombre, je les regardais sortir tous les trois pour prendre leur nouvelle apparence. Se découpant comme des ombres chinoises dans la campagne environnante, je voyais leurs échines se voûter et se hérisser de poils, leurs membres se tordre et s’allonger jusqu’à ce que leurs bras touchassent pratiquement le sol. Leurs oreilles remontaient, leurs mâchoires s’avançaient jusqu’à se déformer en un long museau dont les crocs luisaient sous la lunes, tandis qu’une lumière jaune s’allumait dans leurs regards. Puis, jappant et poussant des grognements gutturaux, leurs silhouettes élancées d’ébattaient avec une grâce étonnante, avant de se séparer pour rejoindre les bois au bout du terrain en pente douce. Je comprenais mieux pourquoi, dans notre petite ville de montagne où pratiquement tout le monde se connaissait, Matt et ses parents vivaient à l’écart…

J’avais appris trois mois auparavant l’effroyable secret de Matt, que j ‘avais considéré comme mon meilleur ami depuis l’enfance. Alors que les troupeaux des éleveurs du coin subissaient de terribles pertes, j’avais fini par faire le rapprochement après que, suite à une violente réaction allergique à la limaille d’argent en classe de chimie, Matt avait manqué les cours pendant une semaine. J’étais allé frapper à sa porte pour lui remettre ses devoirs, mais ses parents m’avaient empêché de le voir. Je n’avais entendu que des râles de douleur me parvenant de sa chambre. Une nuit, un peu avant l’aube, lassé de ne rien savoir sur ce qu’il devenait, j’avais été sur place pour lancer des pierres à sa fenêtre et peut-être l’apercevoir… J’étais finalement tombé sur trois créatures cauchemardesques, aux membres allongés et couverts de poils, dont la tête me rappelait celle d’un loup. Je m’étais caché pour mieux les observer : en remontant vers le porche de la maison, elles avaient rapetissé à vue d’œil, avant de ressembler de plus en plus vaguement à des hommes. Lorsqu’ils avaient allumé la lumière extérieure pour mieux se diriger, j’avais reconnu Matt et ses parents, tous trois nus, beaux et athlétiques, couverts d’écorchures et de sang : c’étaient des loups garous. 

J’avais dès le lendemain envoyé un message à Matt : « Je vous ai vus cette nuit. Je sais tout. » Il avait commencé à me prendre pour un idiot, à me demander si j’étais certain de ne pas m’être trompé. Il m’avait ensuite pris à part après les cours, dans un coin de forêt, pour tout me raconter : il était né ainsi, fait rare. Ses parents avaient été violemment attaqués quand sa mère était enceinte. Matt avait muté en même temps que ses géniteurs. Cependant, il avait été plus évasif concernant ses nuits de traque. Je l’avais pressé de questions, et l’avais vu se refermer de plus en plus… Quand au collège il avait vite grandi pour devenir d’une beauté stupéfiante, populaire parmi tous nos camarades, il avait continué à fréquenter le loser que j’étais. Nous étions les « deux M », Matt et Marc. J’avais eu assez confiance en lui pour lui confier mes problèmes. Il connaissait tous mes soucis, tous mes complexes depuis l’enfance. Et ce chien n’avait rien voulu me dire de sa vie de loup-garou, arguant que « je ne comprendrais pas »… J’avais trouvé une façon de pallier à cette soi-disante incompréhension : j’avais proposé à Matt de me rendre comme lui. De faire de moi l’un des siens. Ma vie, ennuyeuse et solitaire, en eût sans doute été changée, au côté de mon meilleur ami. Mais Matt, contre toute attente, m’avait jeté un regard glacé. 

« Quoi ? Tu te rends compte de ce que tu me demandes ?
- Mais je te comprendrais, il n’y aurait plus de secret entre nous… Et… »
J’avais hésité un instant :
« Et je serais enfin aussi cool que toi. Si les nanas savaient, avec tous les livres à la con qu’elles lisent, imagine le succès…
- Justement, je ne tiens pas à ce que ça se sache. Je ne te transformerai pas.
- Et pourquoi ?
- Parce que je devrais te faire du mal. Je n’y tiens pas. Et parce que ce n’est pas une vie… »
L’ivresse de la chasse, la liberté de courir dans la forêt et la montagne les nuits de pleine lune… Oh oui, ce devait certainement être l’enfer ! Pour qui diable me prenait-il pour me faire gober ça ?
« Et si je disais ce que j’ai vu ?
- Marc, je sais que tu ne le ferais jamais. Tu es en colère, mais tu es un type bien et j’ai toujours pu compter sur toi. Tu ne ferais rien qui nous nuirait, à moi et à mes parents. »
J’avais insisté, jusqu’à avoir l’air d’un cabot pleurnichant. Il n’avait rien voulu entendre et s’était éloigné à grands pas vers la lisière de la forêt. Je m’étais jeté en travers de sa route, accroché à lui.
« Mais Matt, je veux être comme toi ! J’en ai marre d’être un mec ordinaire, un nase… Tu ne préfèrerais pas trainer avec un mec cool ? Et moi, tu y penses ? Tout le monde s’en fout, de moi, quand tu es là ! Moi aussi, j’aimerais avoir quelque chose d’extraordinaire…
- Non, Marc ! Tu es très bien comme tu es, crois-moi ! Le sujet est clos ! »
Il avait fait mine de partir. Quant à moi, d’un chagrin sincère, j’étais passé à une sourde colère. J’avais poussé Matt contre un tronc d’arbre. Il avait sifflé de douleur et m’avait fixé avec fureur. Une lumière jaune, surnaturelle, s’était allumée dans ses yeux.
« Ah ouais ? Moi je dis que ça t’arrange, en fait, que je soins moins cool que toi… 
- Je t’interdis de dire ça, Marc… Tu n’as aucune idée de ce dont on parle ! La douleur quand tu changes de forme, la faim chaque nuit de pleine lune, et de nouvelle lune… Le sang, la violence… Le risque de te prendre une balle par un fermier qui te surprend à tuer son bétail… La culpabilité parce que tu touches à son gagne-pain, mais que tu ne peux pas t’en empêcher ! C’est incontrôlable ! On peut faire tellement de dégâts ! »
Il m’avait repoussé et avait commencé à courir sur le sentier ramenant chez lui.
« Tu n’as pas le courage de faire de moi ton égal, Matt ! Tu es une poule mouillée ! » lui avais-je crié tandis que son ombre disparaissait entre les arbres.
Il avait bien tenté de recoller les morceaux, ce faux-cul. De me récupérer sous sa coupe. Il m’avait envoyé mails, SMS, et même balancé de petites feuilles pliées en cours. De pitoyables messages d’excuses. Je l’avais soit ignoré, soit menacé de tout révéler. Au bout d’un mois, il m’avait enfin lâché. Nous ne nous parlions plus, quand bien même j’avais souvent senti son regard peser sur moi à la sortie du lycée… J’attendais mon heure, et allais régulièrement espionner sa maison pendant la nuit, pour connaître les habitudes de sa famille. Matt poursuivait tranquillement sa vie, entre le lycée, sa bande de copains dont je ne faisais plus partie, une jolie rousse avec qui il avait commencé à sortir, et ses nuits de chasse… Il regretterait bientôt d’avoir toujours vu 

Voici où j’en étais désormais, pourquoi cette nuit, après une bonne dose de bière forte pour reprendre courage et me réchauffer, je m’étais lancé à la poursuite de Matt. Je savais ce que je devais faire : il n’aurait d’autre choix que de me transformer et faire de moi son égal. La pleine lune brillait sur les sommets enneigés et entre les branches, inondant la forêt de reflets bleutés. Les bois étaient silencieux, la neige étouffait chacun de mes pas. Je suivais les empreintes de Matt. J’avais une idée d’où il se dirigeait, vers une bergerie tenue par la femme d’un de nos profs.

Quand une ombre fut enfin visible au loin, je me cachai derrière un arbre pour mieux l’observer. Une longue silhouette aux oreilles pointues et aux proportions étranges se découpait dans une clairière environnante, sur fond de montagnes. Ses yeux brillaient comme deux flammes de bougies, son souffle dessinait des volutes cristallines dans l’air glacé. C’était la créature la plus svelte des trois, que j’avais identifiée comme Matt. La scène avait presque quelque chose de magique, et de prime abord, le loup-garou, avec sa tête gracieuse et sa collerette de poils brillant sous la lune, ne paraissait pas bien effrayant. Étrangement, j’étais si captivé par la beauté du spectacle que je faillis en oublier ma résolution. Un coup de vent décida pour moi. La brise apporta mon odeur au lycanthrope, qui leva le museau pour la humer. Il commença à grogner. Un profond grognement secoua tout son être. Je quittai ma cachette pour m’avancer vers lui. La bête se figea.

« Matt… appelai-je. Matt, c’est moi ! »

Son museau se fronça et ses yeux s’étrécirent, tandis qu’il retroussait les babines, révélant des crocs impressionnants qui luisaient d’un éclat nacré sous la lune. Je m’approchai encore. Matt détala sans demander son reste. Je m’élançai à sa suite.

« Matt ! Matt ! Reviens ! »

Il n’aurait plus le choix, à présent. Il devait me repousser, me griffer… Et une fois cela fait, je m’éloignerais le plus vite possible pour lui échapper. Et je serais comme lui, son égal. Et pas seulement le mec ordinaire né de parents ordinaire, complexé, qui suivait Matt comme un gentil chien-chien. Lui et ses parents devraient m’apprendre à gérer ce nouveau pouvoir, comme dans les films et les livres. Je ferais enfin parti d’un groupe de gens cools.

Matt courait vite, mais mon souhait le plus cher, celui de l’égaler enfin, au lieu de me sentir en tout point surpassé par lui, me donnait des ailes. Le gars un peu mollasson et nul en sport que j’étais se surpassait pour devenir quelqu’un d’autre. Les bonds gracieux de mon ancien ami m’hypnotisaient, je sautai par-dessus des racines et des souches à moitié couvertes de neige pour ne pas le perdre de vue. Mes poumons me brûlaient. Nous nous enfoncions dans de plus en plus dans les bois, et l’obscurité s’épaississait. Je me laissais guider aux bruit léger de ses pas, et aux mouvements dans de rares taches de lumière. Je finis par trébucher pour m’étaler dans la neige. Je me redressai et scrutai les ténèbres autour de moi.

« Où est-ce que tu te caches, sale clébard ? Montre-toi ! »
Le silence me répondit.
« Matt ! Espèce de bâtard ! Si je me perds ici cette nuit, ce sera ta faute ! »

Une brindille craqua derrière moi. Un grondement monta dans la noirceur environnante. Je crus qu’il m’enrobait. Je sentis un souffle chaud dans ma nuque. Mon souffle se coupa quand une truffe humide frôla mon oreille. Mes muscles se tendirent. Mon cœur battait à tout rompre. Ça y était. J’avais ce que je voulais. J’étais finalement arrivé assez près de lui pour l’obliger à se défendre…

« Qu’attends-tu, Matt… commençai-je avec moins d’assurance que prévu Je vais me jeter sur toi… Je te ferai mal… Très mal… »

Il grognait. Une peur irrationnelle m’envahit. Celle de le voir perdre le contrôle et me déchiqueter. Le sentir fouiller mes viscères à coups de dents alors que je vivrais encore. Mourir dans d’atroces souffrances… Je n’avais besoin que d’une griffure, à la rigueur d’une morsure… Je lui assenai un coup de coude dans les côtes. Il me repoussa. Ses griffes s’enfoncèrent dans ma doudoune et la déchirèrent. Nos mouvements se suspendirent quand je croisai son regard, ces deux flammes jaunes dans la nuit. Il grognait toujours. J’attrapai son poignet. À travers mes gants, je sentis ses tendons, chaque tressaillement de son être. Je pris ma décision. De ma main libre, je sortis mon arme secrète. Je saisis dans ma poche une petite boîte. Du pouce, je fis sauter le couvercle. Avant que Matt ne reculât, je lui jetai en pleine poitrine la limaille d’argent que j’avais chapardé au labo de chimie. Un hurlement terrifiant retentit, vrillant mes tympans. Les griffes de Matt traversèrent le molleton de ma doudoune et se refermèrent convulsivement sur mon épaule. Je lâchai un gémissement de douleur et me laissai tomber à genoux lorsqu’il se détacha de moi. Il glapissait toujours. Son cri n’avait rien de naturel. Ni tout à fait humain, ni tout à fait animal. Il pénétrait chaque fibre de mon corps. Qu’avais-je donc fait ? Qu’avais-je fait à mon ami ?

Je portai par reflexe la main à mon épaule ensanglantée. De violents élancements la parcouraient, elle me brûlait. Mes oreilles bourdonnaient. Les glapissements de Matt se firent plus lointain. Je me trainai lamentablement au sol, la gorge serrée par le chagrin. Était-ce cela qu’on éprouvait quand on devenait loup-garou ? Matt avait-il finalement été sincère ? Avait-il voulu me préserver de cela ?

« Matt ! Matt ! sanglotai-je. Matt attends ! Pardonne-moi ! »

J’avais mal. La brûlure irradiait dans mon bras, circulait dans mon sang. Mes tempes bourdonnaient, ma vue se troublait. Le moindre rai de lune m’agressaient les rétines. Le moindre craquement m’arrachait des souffrances à peine supportable. Je me relevai. Un parfum musqué me chatouillait les narines. Je le suivis aveuglément en scandant le nom de Matt. Mon ami de toujours à qui je venais de faire un tort immense… Je progressai dans la forêt et recouvrai peu à peu la vue. Je me retrouvai bientôt dans une éblouissante trouée donnant sur la ligne brisée des Alpes, dont les sommets blanchis scintillaient. Affalé dans la poudreuse, je reconnus un corps. Je me précipitai vers lui. Matt avait retrouvé sa forme humaine… Enfin presque… Je pouvais voir la limaille d’agent chatoyer sur son torse, au milieu des cloques. Il était agité de soubresauts et se grattait à s’en faire saigner. Il ne criait plus, mais des râles affreux s’échappaient de sa gorge. Il étouffait. Je m’agenouillai auprès de lui.

« Matt ! Matt ! Tiens le coup, mon vieux ! Je suis désolé, je vais arranger ça ! »

Ses traits d’habitude si harmonieux avaient enflé, déformés par son allergie. Il ne se ressemblait même plus. Seuls ses yeux, lucides, apeurés et tristes, transperçaient mon âme. Je comprenais à présent. Je comprenais tout. Je m’écroulai sur le sol, au côté de mon ami, de ce frère auquel j’avais tant voulu ressembler, mais que je n’égalerais jamais. Mes articulations craquaient, je crus que ma mâchoire se détachait lorsque j’ouvris la bouche pour crier. Les coutures de mes vêtements, puis de ma doudoune, craquèrent sous l’effet de mes membres qui se tordaient, s’allongeaient. Je me trouvai presque nu dans la neige. Ma peau me démangeait alors qu’une épaisse fourrure la couvrait. Mes gencives chauffaient, grinçaient tandis que des crocs solides remplaçaient mes dents. Matt devait-il endurer cela à chaque pleine lune ? À chaque nouvelle lune ?
Je tournai la tête vers lui. Avant que la vie ne le quittât totalement, je lus une indicible tristesse dans son regard. Une dernière convulsion l’agita. Et ses bras retombèrent mollement sur le sol.

Matt. Tu ne voulais donc pas me dire quelle était ta douleur ? Tu voulais me protéger… Et je t’avais tué, alors que tu avais tout fait pour te contrôler, pour ne pas m'attaquer… J’avais voulu t’égaler en devenant loup, mais au fond, c’était l’humain auquel je n’arriverais jamais à la cheville. Ceux qui t’aimaient, aimaient ta bonne humeur, ton énergie, ta gentillesse… Toutes ces qualités qu’ils eussent oubliées en apprenant ton secret… Comme moi qui te jalousais. Quel ami indigne je faisais…

Mais il n’était plus temps de s’appesantir. J’entendais des jappements qui se rapprochaient. Je bondis, avec un dernier regard pour le cadavre de Matt. Matt dont je porterais toujours la marque de griffe dans la chair, la mort sur la conscience. Et la souffrance dans le cœur. L’instinct de la chasse, enivrant et douloureux, m’envahit. Je courus jusqu’aux fourrés. Autant pour rechercher une proie que pour fuir les hurlements de chagrin des parents de Matt découvrant le corps de leur fils.
C’est ainsi que je devins loup-garou.

Histoire n°3 (Auteur : Neph)

Le loup-garou. Un être, mi-homme sanguinaire, mi-loup solitaire? Il a tant fait parler de lui, au cœur des légendes. Seulement, le connaissons-nous vraiment? Certains diront qu'ils le connaissant bien, d'autres diront simplement que c'est un mythe pour effrayer les enfants, et d'autres encore n'osent pas se prononcer, ayant peur, ou se laissant aller, à de vaines superstitions. Écoutons donc parler cet être mythique, au regard si effrayant:

« Je suis humain le jour, et les soirs de pleines lunes, je me transforme en loup. Assoiffé de sang, je ne suis pourtant pas! J'ai peur, comme tout le monde. Peur de l'être humain, peur du cœur obscur d'une humanité déchue, peur de voir ce que je suis réellement dans les yeux de ceux que je croise, peur de mon humanité naissante, peur de mon animalité galopante...

Pourquoi? Pourquoi me considère t-on comme un monstre? Moi qui suit si sensible, si maladroit aussi, certainement violent, mais souvent de manière exagérée... Parcourant autrefois les rues désertes, je suis un monstre pour certains, une bête de foire pour d'autres... On me dévisage d'un air apeuré tantôt, amusé parfois, et très souvent, avec une haine féroce. Je ne laisse jamais indifférent ceux qui passent voir ma vieille et méprisable carcasse, mais jamais au grand jamais je ne croise quelques âmes sensibles à ma cause. 

Qui suis-je? Avez-vous l'orgueil de prétendre me définir? Ou préférez-vous laisser la peur de l'inconnu germer dans vos cœurs? Oui, j'ai un instinct animal, tout comme vous! Mais je ne suis pas qu'un animal, j'ai un cœur, comme vous! Et une âme, comme vous! Pourquoi refusez-vous la vérité? Je ne suis pas un monstre, je suis ce que vous avez refusé d'accepter dans vos cœurs, votre propre reflet!»

C'est ainsi que chaque soir, le loup garou itinérant, voyageant de spectacle en spectacle, dans une caravane-prison ambulante, racontant encore et toujours la même histoire, espérant qu'une âme éveillée et charitable veuille bien l'écouter jusqu'au bout, sans sourciller, tout en prenant en considération, ce qu'il narre avec passion et désespoir. 

Mais, à chaque fois, le "spectacle" finit bien vite, et l'arrivé de nouveaux visiteurs doivent être rentabilisé. Alors, malheureusement, le loup garou n'a jamais le temps de finir son histoire, et il a grande peine a convaincre son auditoire, plutôt malveillant et pitoyable, dans son manque d'ouverture d'esprit. C'est ainsi que le loup-garou finit sa vie de forçat, sans que personne ne cherche à le délivrer de ses chaînes, sans que personne ne se soucis vraiment de lui.

Et vous, avez-vous entendu l'appel du loup-garou? On l'entend parfois les nuits de pleines lunes. Et, le jour, plus personne ne se souvient de lui, pour ce qu'il est réellement, pour son grand cœur qui bat pourtant ...

Aucune note. Soyez le premier à attribuer une note !

Commentaires

  • BlancheMtCl

    1 BlancheMtCl Le 12/06/2017

    Oh merci beaucoup!
    Je suis très honorée que mon histoire ait plu! D'autant plus que j'ai beaucoup aimé les deux autres histoires! J'ai vraiment hâte de savoir comment elles vont toutes se poursuivre sur le forum!

    Très bonne soirée à tous, j'espère sincèrement re-participer à un challenge, défi ou jeu d'écriture sur le site!

Ajouter un commentaire

Anti-spam